Mes lectures et relectures du moment

Ma très chère Martine,

en raison de quelques beugues pas encore domestiqués je n'ai pas posté des commentaires. cela ne saurai tarder. Aussi je prends ce biais pour vous remercier de m'accueillir en ce forum charmant, pétillant, vif et prometteur d'échanges spirituels et délicieusement corrosifs.
Je suis sous le charme, mais attention non point doucereux. Les mots de Yaëlle et de vous-même nous incitent à Bien Faire et mieux.

Depuis un long moment je peine à trouver des lectures qui me captent assez pour les mener à termes. C'est une désolation et même une honte, j'assume vaille que vaille. Cependant il en ressort que j'invite mes camarades à lire "Bartleby le scribe" de Melville. Une dame de ma connaissance après une indélicatesse entre nous me l'avait fortement désigné comme très représentatif de mon âme. A défaut d'être séduit par MobY Dick et par la dame, je le fut par cette oeuvre déliée, épurée, vive, acide et terrifiante. La métaphysique à l'état de TNT, la comédie humaine en condensé écrite par un auteur"jeune et vif", du Maupassant un jour de priape. Le talent de la dérision dans ce livre est tel que cela m'évoque l'esprit d'un "Bouquiniste Mendl". H Melville aurait presque "selon moi" se réincarner en auteur juif russe de 1910.

Autrement, ART, c'est superbe, j'ai adoré le film le film" pique-nique chez Lulu Kreutz" d'après Yamina Reza. des Bartleby, séduisants, vibrants et palpitants happant à pleine bouche la pulpe et l'écorce de l'existence. Rappelez vous la symbolique de la grenade, le fruit, dans la tradition juive. Les héros de "Belle du seigneur" sont des Bartleby" magnifiques, ils ont mangés chaque grain comme remémoration de leurs péchés, perdants et pourtant...
La vie est un fruit comme la grenade, sanglant et dure en surface et chaque acte en souvenance est un grain dure, livide et amère entouré de sa peau et de sa pulpe fraiche et sucrée. cela nous amène à "Je me souviens" De G. Perec. Une série délicate, dure, sucrée-salée, pulpeuse, de grains, la vie d'homme, quoi! un grand livre même si il en a piqué l'idée à un autre. Vivent les brillants faussaires. L'art du faux, dramaturgie du vrai ou du "mentir-vrai". J'aime les auteurs qui avouent "oui, bon c'est vrai j'ai inventé mais admets quand même que c'est une vrai bonne histoire!".
J'ai relu à propos de gens qui se racontent chacun à leur manière, "E.M. ou la divine barbare" à propos d'Elsa Morante. Fascinant, mystérieux, impulsif comme un grand parfum. Je le recommande en préambule aux grandes nuits décisives. Un autre coup de coeur, c'est la nouvelle traduction de la "Ferme africaine" de Blixen. la lecture a gagné en pulpe et en fluidité"sensualité" et "intimité".
Merci encore Martine de faire passer pour le moment ce petit mot à notre communauté d'oiseaux sensibles qui ne serait rien sans elles.


CyrilG