Aprés-midi pluvieuse
La Bouquine :: Ecriture :: Extraits
Page 1 sur 1
Aprés-midi pluvieuse
Les fenêtres à vasistas sont une caisse de résonance des plus efficaces pour la pluie qui tombe, la Beauce ne prête pas à la rigolade, nulle poésie dans les paysages et le quotidien des habitants est aussi étriqué que les plaines sont infinies, alors avec ce ciel de plomb, la pluie qui dessine des filets épais le long des fenêtres et de l’autre coté de la rue le toit des maisons ou les cheminées de briques se reflètent sur les toits de d’ardoise luisantes tout en laissant échapper quelques panaches de fumée neurasthéniques , il y a là comme une invite incoercible à la morosité, une apathie molle et dépressive, qui me pousse à rester vautré dans le canapé, plus ou moins somnolant, écoutant le staccato hypnotique des gouttes d’eau sur la vitre, se disant qu’il faudrait …oui il faudrait, il faudrait faire, ou penser, enfin agir , par exemple se lever, oui c’est cela il faudrait se lever, alors on s’imagine debout, envisageant une action, ou un début d’action, quelque chose qui ressemble à du mouvement. Allez courir, l’idée est plaisante, bien sur il pleut mais cela cessera bien à un moment donné, courir voilà une bonne initiative, on y pense avec sérieux, tout en écoutant la pluie qui tombe. Il vous semble qu’elle a redoublé de force, est-ce une si bonne idée d’aller se crotter dehors, d’autant qu’il y fait un froid de canard, et puis il y a les chasseurs, cul-terreux de la semaine, Artaban en kaki le weekend rêvant d’un doublé et qui finira en Tartarin dégoulinant. Aller courir avec ces aimables échantillons d’humanité et prendre un risque non négligeable de terminer comme le lièvre qui fait manchon, peu tentant quand on se donne le temps d’y réfléchir, et le temps s’écoule si lentement qu’on a tout loisir de peser savamment chaque option qui se présente, et finalement de s’accorder à penser que la position qui est la vôtre à l’instant, est de loin la plus adaptée à cette envie prégnante de ne rien faire. Cependant il vous semble que la pluie faiblit, puis le silence se fait, un doute ? Une hésitation ? Un remord ? Vous réfléchissez, vous gambergez, cette inaction n’est pas bonne, tous les journaux vous le disent, l’Institut elle même le clame haut et fort, le temps s’écoule alors que vous vous perdez en conjecture, et ce léger bruit réapparaît , petit bruit de billes liquides qui viennent frapper contre la vitre, les meilleures intentions ne sauraient résister à ce son. Pourquoi pas un thé, vous imagez le parfum de bergamotes et de cannelles et avec une petite touche de clou de girofle, senteurs exotiques et épicées qui viendraient flotterait à vos narines, la boisson parfaite par ces temps peu aimables, il suffirait de se lever, faire chauffer l’eau , pas trop, juste frémir, verser le thé dans la théière, puis l’eau, laisser infuser quelques minutes et là le plaisir, vous y pensez avec plaisir, le déguster bien au chaud, avec une tranche de pain d’épices, une douce torpeur vous prend, vous fermez les yeux. Il sera bien temps demain d’y repenser.
La Bouquine :: Ecriture :: Extraits
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|